Dès les prémices, Jerry Pellerin cofondateur de l’agence Caprini & Pellerin donne le ton : les perspectives et la lumière sont les plus belles des matières. Surplombant Cannes, cette villa hybride à mi-chemin entre tradition et modernité pose les jalons d’une vision architecturale sensée, portée par un duo complémentaire. Prise de hauteur.
Avant de prendre notre envol, il est important de connaître la genèse. Puisque tout commence sur les bancs du lycée, où notre tandem préférait s’éclipser des cours pour mieux dessiner des cabanes. C’est certainement ce qui les a réunis et amenés à poursuivre cette aventure commune. Jerry Pellerin, à l’École d’architecture d’intérieur de Nice avant d’être diplômé de l’ESA, à Paris. Kevin Caprini, à l’École nationale supérieure d’architecture de Marseille. Nous avons deux personnalités complètement différentes, confie Jerry. C’est ce qui fait notre force. L’un plus créatif, l’autre plus technique. En règle générale, je trouve que les plus beaux projets sont ceux qui naissent de la dualité, le lisse et le rugueux, le contemporain et le traditionnel. Toutes les oppositions se complètent et produisent une énergie.
Enfants du pays et de la Méditerranée, les architectes se définissent plutôt comme des créateurs d’atmosphères. À l’aise sur toutes les typologies de bâtiments et les styles, néo-provençal, Art déco, moderne ou encore hispanico-mauresque – comme en témoigne la rénovation de l’iconique Palm Beach –, le tandem réprouve les standards. Notre architecture est hypercontextualisée, poursuit Jerry. Ce qui nous anime : connaître et maîtriser les techniques de construction, fidèles à l’époque à laquelle nous intervenons. Chaque fois, c’est une immersion ; une réinterprétation contemporaine d’un style qui s’inscrit dans l’intemporalité. Cette villa n’échappe pas à cette sensibilité conceptuelle. Maison érigée dans les années 1980, elle a fait l’objet d’une rénovation totale.
Le seul moyen que l’on ait trouvé pour bénéficier de grandes ouvertures en façade est de confronter le traditionnel à la modernité.
Repartant de la tour et de l’emprise au sol initiale, afin de ne pas perdre les acquis à bâtir, nous avons conservé l’aura originelle, mais avec cette volonté de l’anoblir, souligne l’architecte. Nous sommes tenus dans la région d’élever des maisons en toitures tuiles. Cela induit des constructions provençale, néo-provençale ou encore Belle Époque, à l’origine de cette ligne esthétique homogène. Mais pas question de faire des effets de pastiches ! Le seul moyen que l’on ait trouvé pour bénéficier de grandes ouvertures en façade est de confronter le traditionnel à la modernité.
Née de ce constat : cette mixité de styles pleinement assumée. Nous avons tout recréé, toitures, voussures, modénatures et ouvertures. Jusqu’à ce volume greffé, avec des casquettes en porte-à-faux. Une idée ingénieuse permettant à la fois d’engendrer dans l’espace salon, cette échappée visuelle sur la baie de Cannes et cette terrasse végétalisée connectée à la chambre maître. En prenant du recul, cette incise audacieuse s’intègre parfaitement dans son environnement, jouant aussi bien sur les restanques en pierres de taille que le béton ciré gris ou l’enduit à la chaux.
Jerry confirme : Par acquit de conscience, notre discipline nous amène à nous poser certaines questions et à avoir une considération envers ce grand paysage. En utilisant le végétal comme un « matériau » à part entière ou encore en évitant les maisons blanches ! Un cadre respecté pleinement absorbé par l’architecture d’intérieur.
Nous mettons en scène les espaces dans le but de générer des sensations.
Nous privilégions toujours la réflexion autour des points de vue et de la lumière naturelle. On ne se lasse jamais d’une belle perspective ni du mouvement solaire ! En ce sens, nous hiérarchisons les pièces à vivre en considérant spontanément le côté émotionnel. Ici, nous avons imaginé une entrée, plus intimiste, envahie par les rayons matinaux. Une respiration avant de profiter des surprises à venir, de toute la verticalité de l’escalier et bien sûr du spectacle de la vue.
À cela s’ajoute une minéralité omniprésente, portée par les matériaux naturels comme sablés : la chaux ferrée ; la pierre d’Ampilly, effet vieilli, posée en longueur libre, bouchardée et brossée dans les angles ; le chêne brut de sciage ; le raphia ; le lin ; le bronze patiné. Des choix dans la continuité de leur démarche : Les matériaux naturels captent la lumière, sans artifices. Ils permettent également de relier l’intérieur à l’extérieur, accompagnés par cette envolée vitrée de plus de vingt mètres, avec ses profils millimétriques et ses rails au sol invisibles. Pour Jerry : L’architecture a aujourd’hui un côté très cinématographique. Nous mettons en scène des espaces dans le but de générer des sensations. Tout est dit !
Architecture et architecture d’intérieur Jerry Pellerin et Kevin Caprini – Caprini & Pellerin www.caprinipellerin.com