Dominant de sa superbe le paysage lyonnais, cet appartement rompt avec les déjà-vu. La conception architecturale a su dompter le caractère singulier d’une construction qui prend sa source au milieu des années 1960. Perspectives, lignes de fuite, circulations soignées, finitions maîtrisées… La signature même de Géraldine Contet.
Architecture en mouvement
Lignes tendues, courbes apaisantes
Pour comprendre le lieu, il faut remonter dans le temps. Précisément en 1965, date à laquelle la construction de l’immeuble matérialise la pensée des architectes René Gagès et Gabriel Roche, habités par l’esprit Le Corbusier. Une vision architecturale forte qui imprègne cet appartement, avec ses ouvertures traversantes et ses loggias généreuses. Si le contexte a séduit les propriétaires, Alice et Claude, il fallait plus que de l’imagination pour se projeter au sein d’un intérieur baignant toujours dans les sixties ! L’architecte d’intérieur Géraldine Contet a donc fait table rase, épousant les contours de l’existant, tout en les métamorphosant à son avantage, afin de répondre au cahier des charges du couple : trois chambres ou une pièce mixte transformable, un bureau, une buanderie, une cuisine fonctionnelle ouverte pour Alice, fermée pour Claude et une atmosphère à la fois sobre et élégante, sophistiquée et masculine.
Le premier parti de l’architecte d’intérieur a été de préserver cette rythmique traversante pour capter toute la luminosité des façades transparentes et l’omniprésence du parc arboré. Naturellement, les scènes de jour se sont orientées au nord-ouest, laissant l’espace nuit évoluer au sud-est, sans hésiter à insuffler des mètres carrés supplémentaires volés aux loggias. Au centre, l’entrée pose les prémices d’un travail d’orfèvre en matière d’agencement (Art Concept), derrière lequel se cache notamment l’accès à la buanderie. À mi-chemin entre le rangement, la cloison et le paravent, les modules toute hauteur imposent leur rythme vertical, mais aussi horizontal avec les façades revêtues d’un enduit strié et patiné (Kanlur), contrastant avec les murs et les plafonds blancs. La matière brute et façonnée distille son aura jusque dans la pièce de vie principale jouant avec la lumière naturelle. Libérés de toutes frontières, le salon, la salle à manger et la cuisine laissent la rondeur s’infiltrer avec subtilité. Ce mélange de linéarité et de courbes est à l’origine même du projet qui flirte finement avec le monde du nautique.
Inspiration yachting
L’univers du yachting est le fruit d’un équi-libre parfait entre élégance et efficience, soucieux d’une confection cousue main, d’une technicité millimétrique, d’une inté-gration et des finitions hors pair. C’est là que Géraldine Contet a trouvé son écho architectural, retranscrit dans l’ensemble de l’appartement. Elle se matérialise particulièrement dans les deux recoins tapis de part et d’autre de la loggia. À l’origine, un seul existait, celui du salon, néanmoins l’architecte d’intérieur a profité de la contrainte de ce podium, filant sur toute la longueur, pour valoriser des scènes satellites et créer une symétrie, côté cuisine, tout en incorporant dans l’estrade des éléments techniques.
Ainsi, les banquettes, confectionnées par le tapissier Xavier Forêt, arrondissent les angles sans ostentation. À l’instar des arêtes murales et des corniches de plafonds, réalisés en staff. Utilisées avec justesse, ces dernières changent littéralement, une fois rétroéclairées, les perspectives et les ambiances, démul-tipliées par le reflet de la télévision intégrée ou du miroir dans la chambre. Tout comme les cloisons amovibles inspirées cette fois de l’univers de l’aviation, qui clôt avec ingéniosité le débat cuisine ouverte/cuisine fermée !
Une suite parentale digne de ce nom
Dans le couloir menant à la master suite, l’intégration lumineuse participe à l’expres-sion architecturale des lieux, marquant le travail minutieux effectué par Géraldine Contet sur les joints creux verticaux et horizontaux, insufflant une rythmique naturelle, qui se prolonge dans l’espace nuit. La salle de bains prend ses aises et intègre habilement une baignoire et une douche à l’italienne. Enrobée de marbre, elle met en exergue un bel ouvrage de miroiterie (Targe). Au verso, le lit semble suspendu dans les arbres et finit de gommer toute trace de la loggia, absorbée dans la conception de l’architecte d’intérieur. Pour Alice, une véritable valeur ajoutée qui a fait toute la différence, non sans nécessiter une mise en œuvre importante… mais qui en valait la peine !
Géraldine Contet, Force Subtile
Il y a tout juste 11 ans, Géraldine Contet sortait, diplôme en poche, de l’ESAIL (École supérieure d’architecture intérieure de Lyon). Dès cet instant, cette passionnée consacre alors son énergie à concevoir des intérieurs aux lignes contemporaines, pendant quatre ans au nom de l’agence Philippe Magnin du Sauzey, avant de marcher dans ses propres pas.
Aux côtés de l’architecte lyonnais, elle se forge une solide expérience, façonnant son talent inné pour les matériaux, l’artisanat et cette façon de conjuguer l’intemporel, le luxe et la rigueur. Aujourd’hui, Géraldine Contet excelle dans la transformation des lieux résidentiels, domptant les perspectives, apprivoisant la transparence et la lumière. Jusqu’à créer du mobilier sur-mesure pour maîtriser encore davantage les contours de ses projets haut de gamme.
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Photographe Erick Saillet