En guise de chevalet : un immeuble du XVIIIe siècle. La toile : une écriture haussmannienne dans son jus. L’artiste : l’architecte Marie-Anne Chapel.
En ce lieu, le propriétaire, Marc, a laissé libre cours à la réflexion conceptuelle de l’architecte, sa passion pour les rénovations de style et son œil averti pour l’art et les meubles chinés. 99 m2 revus et magnifiés.
Nous avons pris un parti radical : le bleu nuit, du sol au plafond pour réchauffer le volume.
De trois à quatre
À l’origine, l’appartement occupait le niveau tout entier, comme il était de coutume dans les immeubles bourgeois. Scindé, il y a quelques années, il a su charmer notre hôte, mais pas sans apporter quelques petites corrections ! Sa volonté première était de basculer du T3 au T4. Pour le reste, Marie-Anne a eu carte blanche, de la conception jusqu’à la décoration.
L’architecte se souvient des prémices : « L’appartement avait été tellement mal divisé que les pièces et alcôves se succédaient sans jamais se répondre, avec un bout de couloir borgne, sans aucune attribution ! Il était impératif de redonner aux pièces une nouvelle assise et surtout une fonction. » Mais dissimulés sous la toile de verre blanche recouvrant l’intégralité des murs, les boiseries, moulures, portes, parquets chevrons en chêne, carrelages et cheminées en marbre promettaient un lieu à la mesure des volumes généreux et de l’envolée verticale de 3,20 mètres.
Il était impératif de redonner aux pièces une nouvelle assise et surtout une fonction.
Marie-Anne a su préserver le maximum de vestiges, comme elle seule en a le secret : « tous ces composants ont été déposés et reposés, en respectant l’ADN patrimonial. Les artisans ont fait un travail d’orfèvre pour les restituer à l’identique, tout en intégrant les équipements modernes, à l’instar de la VMC et en doublant chaque cloison, aujourd’hui parfaitement insonorisée et coupe feu. Un travail invisible qui a nécessité une étude structurelle drastique, afin de consolider les fondations fragiles. » Une toute nouvelle distribution a ainsi vu le jour, avec les pièces de vie et la suite parentale, côté rue, laissant les deux chambres et la salle de bains additionnelle, à l’ombre de la cour intérieure.
La deuxième chambre évoque Antoni Gaudí, emportée par les céramiques disséminées et la couleur bleu ciel soufflée par le carrelage d’origine.
Quête décorative
La marque de fabrique de Marie-Anne : le supplément d’âme ! Chaque meuble, objet, luminaire et œuvre picturale sont le fruit d’une recherche quotidienne : voyages, antiquaires, boutiques vintage, puces, magasins de décoration… L’architecte est en veille permanente ! « Tout est source d’inspiration », confirme Marie-Anne. « Je ne peux m’empêcher de chiner, de passer de nombreuses heures à dénicher des petites merveilles, qui prendront littéralement vie au cœur d’une scénographie pensée en lien étroit avec l’architecture des lieux. Et c’est encore plus vivifiant lorsque le propriétaire partage cette sensibilité pour les belles choses et s’intéresse à l’art et aux objets qui racontent des histoires. » Et toujours cette façon bien à elle d’oser les mariages de couleurs ! Preuve en est, le salon. « Exposée au nord, la pièce de jour capte une lumière froide. Avec Marc nous avons donc pris un parti radical : le bleu nuit, du sol au plafond pour réchauffer le volume, souligné par des touches chromatiques en résonance, comme le rouge et le violet. », décrypte Marie-Anne.
La marque de fabrique de Marie-Anne Chapel : le supplément d’âme !
La cuisine dessinée par l’architecte, suit la linéarité d’un ancien couloir sur plus de 3 mètres et assoit la teinte sombre, avec un stratifié structuré finition pin brûlé. Elle mène tout droit à la suite parentale, qui à l’instar de tous les espaces nuit, s’exprime par une thématique. Ici, c’est le peintre lyonnais Pierre Puvis de Chavannes (1824-1898) qui donne le ton. Un hommage version XXL, prenant les traits d’une très belle sanguine, cristallisée dans un papier peint panoramique. Une fresque nouvelle génération !
Tandis que la deuxième chambre évoque Antoni Gaudí (1852-1926), emportée par les céramiques disséminées et la couleur bleu ciel soufflée par le carrelage d’origine. La dernière chambre exhale, quant à elle, le parfum du Japon, avec notamment l’œuvre murale textile : un kimono authentique et son obi, ramenés par l’architecte lors d’une escapade en terre nippone, le tout maintenu par un morceau de bambou, telle une cimaise. Des petits trésors qui essaiment tout l’appartement et créent à la fois un ensemble parfaitement cohérent et singulier.
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Photographe Erick Saillet