Plus qu’une place, Sathonay est un microcosme, blotti contre les pentes de la Croix-Rousse. Ce quartier à part du 1er arrondissement a sa propre musique, rythmée par l’empreinte des soyeux qui ont façonné son architecture au XIXème siècle. Aujourd’hui, c’est un lieu de vie fourmillant « à la lyonnaise », où quelques pépites sommeillent, à l’instar de cet appartement, entièrement rénové par Marion Lanoë, architecte d’intérieur.
Des pièces évolutives et modulables
70 m2 repensés avec ingéniosité… C’est le pari audacieux d’Emmy et Thomas. Amoureux de ce quartier, le couple a été conquis par cet appartement et ses poutres apparentes, non sans laisser préalablement l’œil avisé de Marion refléter les possibilités qui s’offraient à eux.
Ensemble, ils ont dû composer avec les contraintes du volume. Marion se souvient : « Il aurait été logique d’aménager les espaces nuit côté cour intérieure, pour valoriser, côté place, les pièces de vie bercées par les grandes ouvertures… Malheureusement, la distribution a été dictée par les arrivées d’eau ! Mais de ces contraintes, nous avons pu concevoir un aménagement pertinent où chaque pièce trouve sa fonction et un volume éloquent, avec en toile de fond la possibilité de les faire évoluer selon les besoins du couple. »
Ainsi, la salle de bains généreuse (12 m2) devient un atout rare en centre-ville, là où les moyennes plafonnent à 4 m2. La cuisine, à proximité, est à l’aise, tandis que le salon et la chambre monopolisent la lumière du jour. Au centre des considérations, le coin bureau ajoute une seconde lecture : un espace bibliothèque, voué à se transformer si nécessaire en seconde chambre, pour switcher d’un T2 à un T3, tout simplement.
Charme et modernité, un équilibre
Nos hôtes ont souhaité conserver le maximum d’ornements intrinsèques à l’appartement, en jouant sur les nuances chromatiques, la valorisation ou la dissimulation ! Le parquet chevron, typique des appartements de cette époque, a fait l’objet d’une attention toute particulière, liant les espaces aujourd’hui surfacés d’un vernis mat. Les pierres cachées sont devenues apparentes, au même titre que le plafond à la française gravitant à 4,50 mètres de hauteur.
« Nous avons restauré un maximum d’éléments existants, dont certains avaient été occultés. À l’instar de la chambre, où la rénovation a permis de révéler les poutres éclipsées par un faux plafond. Le marbre des cheminées avait été particulièrement abîmé par la peinture… Nous avons réussi à restaurer celle du living. Les autres malheureusement ont eu moins de chance. Néanmoins, nous ne voulions pas tomber dans l’exagération. Emmy et Thomas avaient pour ambition de vivre dans un appartement ancien, sans sacrifier le contemporain ! »
La modernité est insufflée par les chromatiques, mais également par les claustras ajourés, qui reprennent la rythmique des « tant-plein-que-vide », avec des profilés affinés en chêne. Des ponctuations visuelles affirmées que l’on retrouve dans l’entrée, l’espace bureau et la salle de bain.
La couleur, élément architectural
Pour rehausser le lieu, Marion a mis à contribution ses talents de coloriste. Le bois omniprésent oscille entre naturel et peint, participant pleinement à la délimitation des volumes, particulièrement au plafond. Marion confirme : « L’unité au sol est impulsée par le parquet rénové. La couleur s’inscrit alors à la verticale et à l’horizontale pour éveiller une vision plus moderne et cadencer le décor. Afin d’offrir au lieu une démarcation subtile et une rythmique contemporaine, nous avons joué sur des poutres sablées dans le living et peintes en gris clair dans la chambre. Pour rompre avec la monotonie des solives, un faux plafond en gris anthracite permet de marquer l’espace bureau et de le confiner, comme la cuisine habillée de blanc, augmentant la luminosité de cette pièce borgne. »
Le bleu affirme sa dominance par des variations maîtrisées venant rafraîchir le bois chaud. Dans la chambre, le bleu nuit Seigneurie Gauthier trouve sa légitimité en tête de lit. L’espace bureau succombe au turquoise Ressource. Le gris anthracite Farrow&Ball relie l’ensemble avec plus de force, venant même tromper son monde sur la fenêtre d’atelier en bois, de plus de 2 mètres (une plus grande légèreté et un budget moindre). Le jaune, quant à lui plus timide, se diffuse à l’entrée puis par respiration nuancée sur les meubles réalisés pour le lieu.
La couleur s ‘inscrit alors à la verticale et à l’horizontale pour éveiller une vision plus moderne et cadencer le décor.
Le sur-mesure marque de fabrique
L’architecte d’intérieur met en exergue dans cet appartement sa sensibilité pour le travail d’ébénisterie, d’agencement et de mobilier sur-mesure, via l’entreprise Gentlemen Designers. Cette dernière répond parfaitement à la philosophie du lieu, avec sa double casquette : meubles vintage chinés et réalisations faites main, made in France. Elle signe en ce lieu les tables d’appoint du salon, la table de repas, le buffet, le bureau, les chaises hautes accordées à la banquette revêtue de tissu Kvadrat, la bibliothèque, les claustras, le meuble de rangement de l’entrée… Le tout en résonance avec la palette chromatique initiée par Marion.
De ces contraintes, nous avons pu concevoir un aménagement pertinent où chaque pièce trouve sa fonction et un volume éloquent
Les Gentlemen Designers sont également à l’origine des petites trouvailles qui parsèment le salon telles que la chaise Bertoia, éditée par Knoll et les assises de Arne Jacobsen pour Fritz Hansen ou encore les strapontins de cinéma dans la cuisine. Côté revêtement, difficile de ne pas être séduit par le travail de Carine de Marin, Ô Design Mural, qui sculpte littéralement les panneaux MDF de 19 mm, avec son motif Dentelles. La salle de bains, quant à elle, joue sur les grès cérame Porcelanosa et au sol, une astuce innovante matérialisée par un béton coulé autour d’un tapis de carrelage hexagonal…
C’est aussi le plus de Marion Lanoë, des détails qui font toute la différence !