Au dernier étage d’un ancien hôtel particulier de 1873, Patrick-Romain Morel nous ouvre les portes de son appartement. Un cocon que le décorateur explore depuis quelques années comme un laboratoire, témoin de ses multiples facettes, de ses passions et de son aptitude à dompter les volumes les plus exigus, aux côtés de son complice, l’architecte Franck Vadot. Leur signature : l’optimisation ! Ici, 53 m2, ressenti 70 !
Il aura fallu, à Patrick-Romain Morel et Franck Vadot, de nombreuses années pour se rendre compte qu’ils étaient faits pour travailler ensemble ! Il y a deux ans, c’est le déclic. Il dessine une boîte, je la scénographie et la magie opère, confie le décorateur. Nous avons les mêmes centres d’intérêt, l’art, la musique, la littérature, la peinture, le design, la décoration, l’architecture et dans nos poches une amitié de 25 ans ! Et l’on peut aisément s’en rendre compte en ce lieu. Un appartement qui entre les mains du duo complémentaire a eu plusieurs visages.
Patrick-Romain confirme : Tous les cinq ans, je rase tout et je recommence ! Mais cette fois, je crois que nous sommes arrivés à sa maximalisation. Séduit dès les prémices par la luminosité, le classicisme et le parquet point de Hongrie, le décorateur a pris le parti, pour cette dernière interprétation, d’ouvrir la pièce de vie à son paroxysme. Le salon/cuisine fait 38 m2 ! 40 m2 avec l’entrée. Et ce avec un nombre de rangements exponentiel ! Grâce à cette nouvelle configuration, je peux aisément recevoir 10 personnes, chacun à son aise. Et cette sensation de grandeur est étonnante, portée notamment par la belle hauteur sous plafond, mais pas que !
Tout est à l’échelle, ni plus ni moins. L’agencement millimétrique et le mobilier concèdent même une circulation fluide, tout en multipliant les scènes. Si le recto prône les ornements d’origine, au verso, la modernité du dessin conceptuel prend le pas, sans rupture. Le lien entre passé et présent : la cheminée. Avant de basculer dans la symétrie vers le contemporain avec l’intégration du meuble télévision, puis la cuisine, jusqu’à cette boîte jaune carton – comme se plaît à la nommer Patrick-Romain – qui égaye et démultiplie la lumière naturelle. Cette dernière, particulièrement polyvalente, accueille la salle de bains, la buanderie et des rangements, tout en créant le lien avec le coin nuit. Même si la chambre ne fait que 7,5 m2, elle n’est pas étroite, mais au contraire très cosy, grâce à l’intégration des modules de rangement en guise de tête de lit, qui participe à une sensation de bulle enveloppante.
Tandis que Bach joue les chefs d’orchestre en fond sonore, Patrick-Romain nous cite Kant – résurgence de son ancienne vie en tant que professeur de philosophie – en guise de conclusion ! Le beau est ce qui plaît universellement sans concept. (Critique de la faculté de juger, 1790). Cela traduit sa façon bien à lui d’appréhender les projets, le beau est une question de ressenti, sans jugement de valeur, mais en éduquant le goût, on peut y accéder pleinement.
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Photographe Erick Saillet