Au sommet de l’un des immeubles les plus atypiques de Lyon, édifié en 1879, entre Art nouveau, Art déco et un zeste de style néo-byzantin, le Studio Claude Cartier a rebattu les cartes décoratives et chromatiques de cet appartement-galerie. Là, en lien étroit avec les différentes expressions picturales qui parsèment les scènes de vie, la création est devenue le protagoniste principal.
Trames graphique et colorimétrique
Rénové de pied en cap par l’entreprise Ásgard Asset Management, l’apparte-ment a conservé et magnifié ses apparats d’origine : boiseries, moulures, rosaces, sols, garde-corps, etc. À l’écoute de ces principes esthétiques, Claude Cartier a élaboré un nouveau scénario décoratif autour de la personnalité de la propriétaire, collectionneuse avertie et de ce charisme architectural. Évoluer dans un lieu avec une telle empreinte… C’est un exercice dont je ne me lasse pas, sourit Claude Cartier. Ici, les volumes sont magistraux, les atouts ornementaux exceptionnels, avec notamment ce terrazzo italien/haussmannien ou encore ces cheminées plurielles ! Il est important de comprendre un tel cadre, pour pouvoir avec respect le transporter vers d’autres points de vue.
À cela s’ajoutent « sa patte » et cette façon bien à elle de twister les couleurs et les pièces de design. Travaillés de concert, l’art et la décoration s’enlacent autour du coup de cœur de notre collectionneuse : le tissu polychrome Diamonds d’India Mahdavi pour Pierre Frey. Dès l’entrée, ses impressions graphiques grillagées font leur apparition, entre terracotta, noir et nude. Elles trouvent leur pendant en version bleu nuit, dans le salon réception, contretypant naturellement la teinte profonde du canapé Liaigre, meuble de famille. Ce code couleur rose et bleu, féminin/masculin, se retrouve dans l’ensemble des pièces aux murs et sur les textiles, rythmant l’aplat beige omniprésent, explique Claude Cartier. Parfois, les deux teintes s’équilibrent ou basculent, selon la scénographie et la colorimétrie des œuvres, l’ensemble tramé par ce fil d’Ariane noir encadrant les transitions et les stylobates.
Savants accords
La lecture intensive des lieux a donné vie à de nouveaux usages, portés par le mobilier soigneusement étudié. Et notamment à travers cette entrée majestueuse répondant pleinement à la question posée par Claude Cartier : Comment casser les codes stylistiques et raconter une histoire cohérente dès le début du récit ? Par la fonction ! La générosité de ce volume a permis de rompre avec la sacro-sainte entrée traditionnelle. Elle s’inscrit comme une pièce à part entière, à l’épicentre des attentions. Une salle à manger de poche, hors des conventions !
La pertinence des pièces de design fait écho à l’exigence de la collection photographique et picturale, et notamment la sélection des tapis. Ils dialoguent directement avec les tableaux, en cadrant à leur tour les scènes de vie. Tour à tour, ils renforcent les teintes d’un dessin, apaisent un lavis, accentuent les contours d’une photographie et relient l’ensemble de la sensibilité chromatique des œuvres, à l’instar du tapis Visioni, qui structure le coin repas, en lien avec la chromatique et la géométrie des photographies. Un ballet décoratif où chaque création design ou artistique s’harmonise autant qu’elle s’individualise.
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Photographe Guillaume Grasset