Sur les hauteurs lyonnaises, cette maison bourgeoise des années 1910 a changé son regard, facetté par celui de l’Agence Philippe Magnin du Sauzey. Au sein d’un parc arboré, elle tisse une relation privilégiée avec son paysage, cadré sur des scènes architecturales dessinées avec une précision d’orfèvre. Photogénie.
Mise au point
Sollicitée par la propriétaire, Amandine, pour le trait créatif qui a fait sa réputation, l’agence Philippe Magnin du Sauzey a revu l’intégralité de la distribution spatiale, non sans transiger avec quelques contraintes imposées par les éléments originaux. Aurélien Varvarande, architecte d’intérieur chargé du projet, confirme : Nous avons dû composer avec l’escalier central, mais également avec certaines données existantes, telles que les sols, que nous souhaitions préserver. En effet, si les parquets ont été conservés pour suggérer l’identité patrimoniale du lieu – vitrifiés et teintés noir afin de correspondre à la nouvelle ambiance chromatique – dans le hall d’entrée, les carreaux ciment vétustes ont été remplacés par un sol en béton sombre.
Dans notre parti pris, nous avons naturellement fait face à cette différence de surfaces et fait le choix de l’assumer à notre façon, en créant ces transitions coffrées en FenixNTM, circonscrites par ce trait lumineux, pourrait-on dire, en guise de seuil ! En résonance avec les huisseries volontairement amplifiées, ces lignes directrices en forme de U imposent leur rigueur contemporaine et assoient cette notion de cadrages, chère à l’agence. Bien que divisés, l’espace living et la salle à manger-cuisine se répondent grâce à un duel de miroirs, l’un au-dessus de la cheminée d’origine, le deuxième intégré à la console dessinée. Tout est une question de perspectives, souligne Aurélien Varvarande.
L’architecture d’intérieur se met ainsi en mouvement et se structure. Nous ne parlons pas de miroirs narcissiques, bien au contraire ! Chacun a été pensé en fonction du volume, de la lumière naturelle, de la profondeur de champ souhaitée et des points de vue définis. C’est un exercice qui impose une extrême précision, le moindre défaut étant facilement démultiplié par deux ! Une exigence que l’on retrouve également dans le travail de la lumière.
Pour Aurélien Varvarande, une évidence : La lumière, au même titre qu’un mur, est structurelle. Dès la première esquisse du projet, nous pensons « éclairage », tant dans sa fonction première pour préciser le dessin architectural que dans ses principes esthétiques afin de flatter les matériaux. La conception lumière offre également une seconde lecture, comme dans le salon, où les deux spots à faisceaux serrés au-dessus de la fenêtre prennent le relais sur le tableau végétal, la nuit, pour révéler une nouvelle scène expressive.
Dichromie argentique
Si au rez-de-chaussée, la configuration des pièces évolue au fil de l’axe nord-sud, à l’étage l’orientation transversale est-ouest est privilégiée, scindant naturellement les zones nuit, marquées par des portes à galandage. Là encore, les perspectives se prolongent à l’infini, grâce au jeu de miroirs parfaitement symétriques, qui ponctuent l’entrée des chambres, dont la master suite.
À cet étage, le rapport des deux chromatiques s’inverse. Les façades de l’agencement deviennent blanches et les joints creux de 20 mm des profilés et des plinthes se teintent de noir. Un fil d’Ariane minutieux qui témoigne de la précision de cette réalisation, à l’instar des colonnes créées pour encadrer le store et la fenêtre de la suite parentale ou le caisson accueillant la tête de lit monolithique, jusque dans la salle de bains où le sèche-serviettes a été teinté dans la même finition que la robinetterie Fantini…
Cette réalisation s’inscrit dans l’équilibre, avec ses empreintes féminines, ses lignes masculines, son rapport omniprésent noir et blanc et la juste proportion de chacun des éléments intégrés. L’architecture d’intérieur devient ainsi le premier décor, intemporel, conclut Aurélien Varvarande.
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Photographe Erick Saillet