Sur les rives de Saône, les façades en « touches de piano » panachent l’un des plus anciens quartiers de la ville. Le Vieux-Lyon impose sa stature patrimoniale, gigantesque palette d’artistes-peintres aux pinceaux teintés d’ocre, de rose patinés ou de jaune vieillis.
Les spectateurs : des appartements rares. Ils contemplent sur la rivière le ballet vivant de péniches et de bateaux. C’est ce cadre de prédilection qui a séduit nos hôtes du jour, emportés par la proposition de rénovation de Pierre-Emmanuel Martin et Stéphane Garotin, le tandem insolite de Maison Hand. Une nouvelle lecture architecturale et décorative d’un appartement cristallisé dans les années 50. Baguette magique.
Que la lumière soit
Cette réalisation est la fusion d’un appartement de 55 m2 et de combles perdus. Soit 90 m2. Parti de loin, le duo a entièrement revu les contours existants. « Typique des années 50, l’ensemble était morcelé en une somme de pièces exiguës et sombres. » se remémore Pierre-Emmanuel Martin. L’étude du projet met en exergue plusieurs contraintes notamment dans la particularité des trois ouvertures généreuses toutes orientées en façade nord-est. Mais également l’obligation de conserver le conduit de cheminée existant.
De ces difficultés intrinsèques au lieu, Maison Hand en a tiré une force : « Naturellement, nous avons revu l’intégralité des volumes entièrement tournés vers la source de lumière. Nous avons transformé le conduit en un précieux atout au service d’une circulation simple et claire, devenant une liaison verticale reliant l’étage inférieur au niveau supérieur ». Les zones de vie décloisonnées, au profit d’un espace ouvert dénué de toutes portes-obstacles, bénéficient du clair de jour de la fenêtre et des deux baies vitrées, en enfilade. Résultat, la lumière s’immisce dans chaque recoin, sans jamais laisser une pièce borgne.
Prise de hauteur
Les combles à l’origine complètement indépendantes, avec leur propre entrée conservée, ont fait l’objet d’une rénovation plus conséquente. Les décorateurs ont alors pris le parti de s’affranchir de la moitié :« Côté rue, l’espace sous pente était inférieur à 1,80 mètres. Dans le sens de la longueur, nous l’avons littéralement ouvert en deux. » Pour ce faire, la chape existante a été déposée, puis reposée avant d’être consolidée par des poutrelles afin de créer la zone bains et le coin nuit. « Nous souhaitions que l’étage profite également de la lumière naturelle et par ricochet du panorama fluvial. »
Raison pour laquelle, le duo a imaginé un système de verrières en acier, avec ouvertures, d’une part pour faire circuler l’air avec le concours des fenêtres de toit intégrées et, d’autre part, jouir du point de vue plongeant sur la Saône. Cette implantation permet également d’insuffler au salon et à la salle à manger une envolée verticale élogieuse et de permettre aux trois fenêtres d’exprimer pleinement leur caractère pictural avec pour toile de fond les rives de Saône.
L’optimisation nouvelle définition
Chaque mètre carré a été pensé dans sa dimension la plus fonctionnelle. Dès lors, les pièces de jour peuvent s’exprimer sans contraintes. L’entrée dissimule habilement des toilettes invités et une buanderie confinée sous l’escalier. Ce dernier a été conçu en lien étroit avec le volume de jour principal, sans l’entraver. Les marches flottantes participent à cette volonté de légèreté. La structure en bois laisse ainsi la part belle au salon et dialogue avec le parquet d’origine, à bâtons rompus. Pièce centrale de l’appartement, le système Lema a été réfléchi comme un élément multi-facettes et multi-fonctions, tout en concédant une dynamique verticale maîtrisée. Au verso, une bibliothèque/télévision. Au recto, un coin rangement/bureau.
La cuisine ultra-fonctionnelle joue les invisibles, tout de blanc vêtu, magnifiée par des zelliges qui lui confèrent une touche marocaine, chère à Maison Hand. La banquette Sarah Lavoine quelque peu transformée par Pierre-Emmanuel Martin et Stéphane Garotin, permet d’accueillir jusqu’à 6 personnes, tout en offrant grâce à son coffre, un espace de rangement additionnel.
À l’étage, les rangements visent également cette optimisation, avec des systèmes toute hauteur disséminés dans la salle de bains, réalisée par Boffi et le dressing Lema intégré dans la chambre, avec ses façades chaleureuses en chêne brûlé, en contraste direct avec la résine blanche au sol reliant l’intégralité du niveau.
Nous souhaitions que l’étage profite également de la lumière naturelle et par ricochet du panorama fluvial.
Sophistication du détail
Pour Pierre-Emmanuel Martin, la réussite de cette réalisation s’exprime également à travers les finitions : « Nous avions la chance d’avoir des propriétaires exigeants avec un sens du détail et de la décoration averti. » Des interrupteurs en laiton chromé Meljac aux radiateurs Acova au design rétro, en passant par le système audio intégré Bose, l’ensemble de la réalisation s’inscrit dans un rendu visuel parfait. À cela s’ajoute l’univers décoratif mêlant avec justesse des pièces de design iconiques, des luminaires signatures, des meubles plus contemporains, associés à du mobilier de famille. Un bijou au fil de l’eau.
Photographe Guillaume Grasset