Sous l’impulsion de l’architecte Sophie Dries, cet appartement haussmannien est le théâtre d’un nouvel univers stylistique contemporain. Un ailleurs contemplatif au cœur de Paris où œuvres d’art, pièces de design, textures et artisanat deviennent des acteurs éveillés et incarnés par une conception en phase avec son époque. Matière à créations.
Un jeune couple gravitant dans l’univers de la mode. Elle, en qualité de styliste, lui, artiste digital, tous deux, fins collectionneurs d’art moderne et de design contemporain. Une architecte-designer ensemblière exercée au beau et aux savoir-faire artisanaux chez Pierre Yovanovitch, Christian Liaigre, et aujourd’hui au sein de sa propre agence, créée en 2014… Soit, le point de départ d’une conception unique ! Nous étions sur la même longueur d’onde, sourit Sophie Dries. Cela m’a permis d’appréhender l’appartement de 80 m2 comme une œuvre vivante.
Entièrement réhabilités et restaurés, les éléments patrimoniaux s’inscrivent ainsi comme la toile de fond de cette collection privilégiée. Le leitmotiv était de valoriser les qualités de l’haussmannien sans les dénaturer et de s’appuyer sur cette matière architecturale volontairement infusée par des tonalités naturelles pour composer à travers le mobilier, les objets, les tableaux, les sculptures et les matières, de nouveaux points de vue, souligne Sophie.
Ainsi filigranée, l’essence des lieux traversée par la lumière se connecte aux ponctuations brutalistes et aux formes organiques convoquées par l’architecte, telles la cheminée apprêtée d’un manteau de plâtre, la cuisine relevée par une crédence en laiton patiné et enterré pendant des semaines pour provoquer ce motif cosmique insolite ou encore la salle de bains distinguée par ses volutes en béton ciré.
Aux pièces vintage se mêlent des ponctuations brutalistes fortes, comme la cheminée en plâtre.
Je fuis les idées préconçues, confie-t-elle. Un projet naît d’un lieu et d’un mode de vie. La question conceptuelle réside dans notre capacité à les relier, à les traduire et à les insuffler dans une réalisation qui ne ressemblera à aucune autre. Ici, l’identité du couple passe par ces éléments forts en résonance avec sa sensibilité artistique. Et tout particulièrement la pièce d’eau inspirée de la Grèce et de ses « katikias », maisons traditionnelles des Cyclades, chères au couple.
Des ouvrages à part entière qui, de pair, ont permis de gommer certains aléas d’origine. Et par la main des artisans, d’invoquer la maestria. Je suis un chef d’orchestre. Je ne joue pas de tous les instruments !, confie Sophie. Ce rapport au geste artisanal est primordial au sein de mon agence. C’est un travail d’équipe, qui nous apporte beaucoup mutuellement. Sophie se plaît également à valoriser un design vertueux, éloquent dans sa pérennité. L’architecte confirme : Étant moi-même designer, je m’interroge forcément sur ce monde saturé d’objets et leur impact sur l’environnement. C’est important de connaître leur provenance et leur durée de vie.
Une inclination partagée par les propriétaires, soucieux de s’approprier du mobilier et des objets avec une histoire, une patte qui s’inscrit dans la transmission. Se mêlent ainsi des pièces chinées des années 1950, telles que les assises « haricot » en velours vert, les lampes de Charlotte Perriand, à du mobilier vintage 1990, à l’instar des différentes pièces iconiques de Philippe Starck, tutoyant des créations originales comme le vase Traces, en céramique noire gougée et en laiton patiné signé par l’architecte… ou encore la composition phare de la collection : la table, le banc et les tabourets en bronze et chêne patiné, aux dimensions personnalisées pour l’occasion par l’ébéniste et sculpteur Valentin Loellmann. Un monde de vintage, de galeries, d’artisanat, d’émotions créatives qui s’éveille tout en délicatesse et en finesse.
Photos : Stephan Julliard