Au cœur des Alpes suisses, le chalet Black Bear laisse sur la neige fraîchement tombée l’empreinte conceptuelle de la designer, scénographe et architecte d’intérieur Alexandra de Garidel-Thoron. Une rénovation d’ampleur additionnant les superlatifs, mais également les qualificatifs autour du terme de l’art : architectural, artisanal, artistique. Un lieu immersif où la montagne se réinvente dans la création.
Pour l’anecdote, ce chalet porte le nom de Black Bear, d’après la sculpture d’un ours à taille réelle signée Xavier Veilhan, plantée devant sa porte d’entrée. Ses propriétaires l’ont commandée sur la base d’une modélisation 3D et d’une référence de couleur RAL, qui donnait l’impression d’un gris anthracite. Imaginez leur surprise quand ils ont découvert à son arrivée une teinte gris pâle ! L’ours avait perdu ses couleurs, se remémore l’architecte d’intérieur. Comme le chalet avait déjà été baptisé, il leur était inconcevable qu’il ne soit pas noir ! Du coup, nous avons dû le repeindre !
L’architecte d’intérieur conçoit chacun de ses projets autour de l’art.
Avec sa stature de 600 m2, le chalet avait beau dominer l’une des stations de ski les plus huppées de l’Europe, il était tout sauf chic lorsque Alexandra l’a visité pour la première fois. Elle se souvient d’un décor à l’italienne avec des plafonds bleus et des placards jaunes, de petites pièces sombres et d’un dédale de couloirs. Rien n’amenait à rien, poursuit-elle. On se perdait littéralement dans cet intérieur labyrinthique ! Après quatre années de restructuration, le chalet s’est éveillé sous son influence artistique.
Les nombreuses œuvres ont été sélectionnées pour leur lien au monde de la montagne.
En effet, Alexandra conçoit chacun de ses projets autour de l’art. C’est ma façon d’appréhender les choses, sourit-elle. Même s’il s’agit d’un simple bougeoir, je préfère qu’il soit dessiné par un artiste ! Ici, de nombreuses œuvres ont été sélectionnées pour leur lien au monde de la montagne. Parmi elles, un autoportrait de l’artiste serbe Marina Abramović, éminçant des oignons dans ce qui ressemble fortement à un chalet ou une sculpture en marbre de Tony Cragg, dont les formes cotonneuses ne sont pas sans rappeler la neige. En parfaite harmonie avec les œuvres d’art, la décoration fait référence à l’environnement alpin, par ses formes et ses teintes évocatrices.
Pour la plupart des murs et des plafonds, Alexandra a opté pour du vieux bois taillé à la hache, tandis que l’espace wellness se confond avec les glaciers, par sa mosaïque d’un bleu similaire. À l’extérieur, le bar, commandé directement au designer français Arik Levy, retranscrit le relief des rochers. Quant à la cheminée dans la chambre principale, sa forme s’inspire des blocs de neige des igloos. Comme si on en avait coupé un en deux, précise Alexandra. L’autre thème choisi par l’architecte d’intérieur est celui de l’amour.
Je suis une grande romantique, avoue-t-elle. Il y a de petits clins d’œil partout. Un exemple parfait est l’œuvre de Tracey Emin dans le couloir du rez-de-chaussée, dont les tubes en néon dessinent la phrase : You made ME Love You. Un autre ? Le heurtoir sur la porte de la chambre principale qui prend la forme d’une cuillère. Pour moi, elle symbolise la gourmandise dans l’intimité, confie-t-elle. Une chose est sûre : les propriétaires sont tombés follement amoureux de leur Black Bear. C’est un lieu extraordinaire, s’enthousiasment-ils. Une œuvre d’art en soi dont nous sommes très fiers.
Photographe : Stephan Julliard
Architecte d’intérieur : Alexandra de Garidel-Thoron