Couple au travail comme à la scène, les jeunes architectes d’intérieur Kim Haddou et Florent Dufourcq rêvaient d’évoluer au sein d’un appartement typiquement haussmannien. Mais, la vie en a décidé autrement. Ils nous accueillent dans leur duplex de l’est parisien, où règne un esprit épuré, doux et original.
C’est en 2018 que le binôme s’est d’abord fait connaître en remportant le premier prix du Design Parade Toulon pour une salle de lecture éphémère baptisée Grotto. Depuis la création de leur propre agence l’année suivante, Kim Haddou et Florent Dufourcq ont équipé une boutique pour Maje, rue Saint-Honoré à Paris, une autre pour Hermès à Saint-Tropez et sont en train de mettre les touches finales aux 37 chambres du tout nouvel Hôtel Lilou à Hyères. Cet appartement près de la Bastille ne correspond pas vraiment à leur recherche initiale.
Quand nous avons commencé à chercher, nous avions en tête un endroit typiquement parisien, avec un vieux parquet, une cheminée et des moulures, confie Florent. C’est ainsi qu’ils ont fini par trouver ce duplex de 65 m², sans aucune distinction architecturale particulière, situé au sein d’un immeuble datant de 1965. Ils ont néanmoins été séduits par le hall d’entrée, enveloppé de pierre beige, qui leur fait plus penser à Milan qu’à Paris. Ils ont également adoré le fait que l’appartement offre une vue dégagée, qu’il soit inondé de lumière et qu’il dispose d’un escalier central. Pour Kim, ce dernier ajoute une dose considérable de charme. Le duplex était resté dans la même famille depuis la date de construction de l’immeuble et n’avait jamais été rénové. Il y avait encore une bibliothèque en liège dans le salon, de nombreux tuyaux visibles, une profusion de papier peint (même sur les plafonds) et des corniches en faux polystyrène.
Plus que tout, ce lieu nous transporte ailleurs. Lorsque nous fermons les rideaux, nous pourrions être presque n’importe où.
Le couple a décidé de tout épurer et de supprimer une cloison qui divisait le salon en deux. Ensuite, ils ont revêtu la partie inférieure des murs du nouvel espace à vivre de plaques de travertin, disposées afin que les veines alternent entre l’horizontal et le vertical. Nous avions envie d’apporter un élément minéral et d’englober le tout d’un seul matériau, explique Kim. Partout, ils ont opté pour une palette de couleurs apaisantes, caractéristique de leur travail. Toute la journée, nous devons imaginer des univers, chercher des tissus et des matières, et lorsque nous rentrons à la maison le soir, nous avons besoin d’un cadre reposant pour les yeux, poursuit l’architecte d’intérieur. Ils sont également fans de murs en miroir et de rideaux.
Pour Florent, ces derniers aident à créer un effet théâtral. Parmi les autres gestes visuels forts, on peut citer la cuisine sculpturale en acier inoxydable (délibérément dépourvue de meubles hauts) et le canapé sur mesure de trois mètres de long en forme de banquette. Lorsqu’un espace n’est pas grand, les gens ont tendance à choisir de petits meubles, note Florent. Au contraire, nous voulions quelque chose qui ajouterait une touche de grandeur. Et que dire du tapis ? Le binôme est tout à fait conscient que l’installation d’un parterre blanc dans un salon avec une cuisine ouverte n’est pas pour tout le monde ! Si nous le proposions à nos clients, ils penseraient que nous sommes fous, admet Kim. Une expérience, donc. Nous nous sommes dit que nous n’avions pas d’enfants et que nous n’étions pas si maladroits ! Cela pourrait fonctionner assez longtemps, sourit-elle.
Les architectes d’intérieur-designers aiment particulièrement le confort qu’il offre et jusqu’à présent, tout se passe pour le mieux. Il n’y a pas une seule tache en vue ! Les autres meubles ont été choisis avec beaucoup de minutie. Il n’y a pas beaucoup de pièces. De ce fait, nous voulions nous assurer chaque fois d’avoir trouvé la bonne, précise Florent. Fait intéressant, un bon nombre sont italiennes, comme la table à manger Africa d’Afra et Tobia Scarpa et la chaise en plastique noir de Vico Magistretti dans le salon, ainsi que les tables de nuit en rotin et les lampes Shogun de Mario Botta dans la chambre. On retrouve également une chaise en bois cintré créée dans les années 1970 par le designer néerlandais Gijs Bakker. Le fait que tant d’objets sont de provenance étrangère semble tout à fait approprié… Après tout, l’appartement est tout sauf typiquement français. Plus que tout, ce lieu nous transporte ailleurs, conclut Kim. Lorsque nous fermons les rideaux, nous pourrions être presque n’importe où.
Texte et production : Ian Phillips
Réalisation : Kim Haddou et Florent Dufourcq