En nous égarant dans ce quartier parisien, nous croisons l’architecte Florence Poncet qui remonte le temps, capturant les époques dans cet ancien atelier de peintre du XIXe siècle. Ici, la créativité flotte dans les airs comme une muse. Découverte.
Au détour d’une avenue verdoyante, les demeures historiques aux styles éclectiques intriguent, le parfum des fleurs envoûte… Des notes de piano virevoltent dans l’air et nous aimantent. De l’atelier, Florence Poncet n’a gardé que la verrière et le parquet ! Table rase donc, mais sans se départir du caractère unique de ce duplex de 95 m2, en lien étroit avec le couple Hortense et François.
Soupesant dans sa conception créative l’authenticité et le raffinement, l’architecte a peint dans les moindres détails ce nouveau tableau connecté au jardin arboré, témoin de sa sensibilité innée pour les meubles et objets chinés. Si la disposition des lieux reste sensiblement la même, troquant la fonction d’un espace pour une autre, l’architecte a dû composer avec des volumes à la fois étirés et recentrés, aux angles approximatifs.
Le sur-mesure a été une nécessité pour modeler l’ergonomie, au centre de toutes les considérations.
Florence Poncet se souvient : L’atelier était très exigu, avec des murs à peu près droits ! Le sur-mesure a été une nécessité pour modeler l’ergonomie, au centre de toutes les considérations. À cela s’ajoutent les personnalités singulières du couple… Hortense, extravertie, à l’aise dans les espaces ouverts et conviviaux. François, plus introverti, adepte des espaces structurés et minimalistes, sourit Florence Poncet. L’organisation spatiale devait prendre en compte leurs différents modes de vie. Comment ? En se servant de la rythmique des lieux.

Toute l’énergie conceptuelle de l’architecte se penche alors sur l’équilibre. Celui entre les différentes amplitudes du duplex. Celui entre les aspirations opposées du couple. Ainsi, les scènes de jour s’individualisent, progressivement affinées par un agencement intérieur évolutif en relation avec l’ensoleillement septentrional lumineux et doux, filtré par la verrière. Cette nouvelle approche contrebalance l’envolée de six mètres et le volume sous la mezzanine. Une telle hauteur n’est jamais agréable à vivre. Je l’ai donc ramenée à une échelle humaine en peignant un soubassement continu proportionnel au mobilier et reliant les scènes intérieures entre elles et l’extérieur. Une astuce qui a également permis d’absorber la fenêtre basse d’origine traçant un chemin singulier vers le jardin.

Une telle hauteur n’est jamais agréable à vivre. Je l’ai donc ramenée à une échelle humaine en peignant un soubassement continu proportionnel au mobilier et reliant les scènes intérieures entre elles et l’extérieur.
Pour que cet électron libre retrouve sa légitimité sans pénaliser les lieux, Florence Poncet a créé un stratagème matérialisé par cette banquette filante en béton ciré étirant l’escalier rénové et dissimulant tous les équipements de la télévision masqués derrière les panneaux coulissants revêtus de textile ! Ce trait d’union verdoyant reproduit la végétation avec un vert d’Egypte (Argile) intense, contrasté par le blanc éclatant du salon et adouci par la teinte brenta, dans la salle à manger. La couleur, véritable appui spatial, défie les proportions et participe à la structuration des scénographies, tout autant que l’agencement flexible. Travail d’orfèvre, ce dernier suit le quotidien d’Hortense et François, comme en témoigne le mur de rangements escamotables.
Sous la mezzanine, les systèmes de portes coulissantes et les portes-accordéon changent totalement l’esthétique du coin repas, selon leur position, et permettent d’intégrer des fonctions particulières, tout en participant à la décoration de l’ensemble.
Sous la mezzanine, les systèmes de portes coulissantes et les portes-accordéon changent totalement l’esthétique du coin repas, selon leur position, et permettent d’intégrer des fonctions particulières, tout en participant à la décoration de l’ensemble. Accueillant un bureau d’appoint, une buanderie, jusqu’à étirer le volume de la cuisine exiguë avec des rangements complémentaires, cette partition murale, fermée, sculpte et réchauffe les lieux par sa présence matérielle en frêne teinté et son veinage flammé aux expressions plurielles selon les rayons du soleil. Ouverte, la couleur du panneautage dialogue avec le parquet restauré.
À ses côtés, la cuisine, prenant ses aises dans la salle de bains originelle, est le compromis idéal entre Hortense et François, reliée au coin repas par une porte coulissante et connectée au salon via le passe-plat. Au-dessus de cette atmosphère, une autre prend vie. En lieu et place de l’escalier en bois, le nouveau, en béton, s’allège avec un garde-corps aérien en métal. Il mène à une boîte « couteau suisse ». Suspendue, cette dernière se transforme à volonté en chambre d’amis, dotée d’un point d’eau et d’un dressing, à l’intimité assurée par les panneaux coulissants revêtus de tissus occultant et acoustiques. Ou elle développe une relation contemplative avec la cime des arbres, en plongeant son regard depuis le bureau.
Dans ce ballet modulaire, les éléments de décoration vintage, mobilier, objets, pépites vintage, se multiplient, comme autant de coups de cœur sélectionnés avec soin par l’architecte aux Puces de Saint-Ouen et de-ci de-là. Une enceinte hors du temps qui mêle toutes les sensibilités esthètes de Florence Poncet, de l’architecture au design.
Photographe : ©Julien Hay