Mêlant avec délicatesse haute-couture et architecture d’intérieur, Guillaume Alan renoue avec la notion de décorateur-ensemblier à travers ses réalisations « carte blanche ». Cet appartement n’échappe pas à sa griffe ouatée et figure un dessin épure sans jamais se départir d’une humilité historique.
Au cœur de la capitale, cette parenthèse lyrique de 160 m2 se situe au dernier étage d’un immeuble haussmannien, chahutant à ses pieds la tour Eiffel et la Seine. Ce lieu capte toutes les subtilités du designer à mi-chemin entre ses références patrimoniales et contemporaines, « la Cour Carrée du Louvre et la simplicité du Pavillon Barcelona de Mies Van der Rohe. Un amour pour la pureté classique », dixit Guillaume Alan.
Ici, les propriétaires souhaitaient retrouver cet esprit cristallin découvert lors de l’acquisition de pièces de mobilier il y a quelques années – lorsque Guillaume Alan ouvrait son bureau d’études à seulement 22 ans ! Dans un coin de leur tête, le designer rentrerait un jour par la grande porte de leur demeure ! Chose faite ! Non sans renverser de sa patte minimaliste les codes en vigueur, s’attachant à la vue à 360°.
La lumière crée l’architecture, c’est grâce à elle que les murs, l’espace et les ombres peuvent exister.
Déshabillé, l’espace a été entièrement réorganisé et restructuré, vibrant au son de cette monochromatique, « baptisée craie », nuancée, déclinée, mais jamais ennuyeuse. Cette richesse de textures est éprouvée par un travail d’éclairage, à la fois intense et spectral, matérialisant en substance le dessin architectural. « La lumière crée l’architecture, c’est grâce à elle que les murs, l’espace et les ombres peuvent exister », souligne le designer, avant de citer Le Corbusier : « L’architecture se découvre en marchant ».
Au centre des considérations, la cheminée, sculptée dans un seul bloc de marbre de Carrare, allège le propos conceptuel, flottant dans l’air évanescent.
C’est donc dans le mouvement que cette réalisation œuvre dans une tranquillité cotonneuse, que l’on pourrait presque attrapée du bout des doigts. Mais avant de la toucher, l’entrée se dévoile telle l’Orangerie du Château de Versailles ! Succession d’arches en pierres naturelles et miroirs encastrés tissent une galerie hors-norme tapissée de gris, bronze et vieil or, pigments originaux de la mosaïque préservée.
De cet antre minéral surgit le salon, éloquent dans sa quiétude minimaliste baignant dans ce coloris crayeux et le marbre entrecroisé de chêne brossé. Volant à une hauteur vertigineuse – 5, 20 mètres ! – l’espace se constelle d’un plafond voûté étirant la baie vitrée inspirée d’une ancienne porte, souvenir d’un voyage à Oxford. Au centre des considérations, la cheminée, sculptée dans un seul bloc de marbre de Carrare, allège le propos conceptuel, flottant dans l’air évanescent. La lumière naturelle accroche de-ci de-là des colonnes, des totems en bois ou encore les lignes, tendues ou courbes, du mobilier dessiné sur-mesure, entre cuir souple et frêne brossé.
Ou comment les pièces de mobilier naissent des projets et répondent, en parfaite harmonie, à l’architecture.
À ses côtés, la salle à manger appelle la lumière naturelle de son aura immaculée, liant les pièces de jour. La cuisine reprend cette ligne directrice, utilisant le marbre à la verticale, sous la forme d’un stylobate contemporain et d’une crédence, veinant également les plans de travail. Au chêne se substitue le frêne, affirmant sa finition brossée sur l’agencement cousu main. La cuisine illustre également mon travail, confie Guillaume Alan. Ou comment les pièces de mobilier naissent des projets et répondent, en parfaite harmonie, à l’architecture.
Côté nuit, la suite parentale cultive cet esprit zen, bordée de lin naturel au sol et sur les rideaux – sans aucune coloration de matière ! – et d’un soubassement de 12 mètres filant jusqu’à la salle de bains. Cette dernière témoigne de l’attention portée au marbre et à son veinage soyeux et poétique. Tournant autour du luxe à l’état pur et de la radicalité conceptuelle, la pièce d’eau s’équilibre grâce à la douceur apportée par les larges doubles portes sur pivot, en frêne brossé.
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Photos : ©Matthew Donaldson